CONFÉRENCE DU GÉNIE CIVIL: 2 mai 2018
Nant de Drance
Les défis d’un chantier de génie civil hors norme dans les Alpes valaisannes
Gérard Seingre, Ingénieur civil EPFL
Mercredi 2 mai 2018 à 17h00
Haute école d’ingénierie et d’architecture de Fribourg
Auditoire Edouard Gremaud, Bd de Pérolles 80, 1700 Fribourg
Dix ans de chantier en souterrain et à haute altitude, 2 milliards de francs d’investissement, 400 ouvriers en moyenne et jusqu’à 650 au maximum de l’activité, 17 km de galeries creusées, 1,7 million de m3 de roche excavés, 450’000 m3 de béton mis en place, la plus grande caverne d’Europe, le chantier de Nant de Drance est celui de tous les superlatifs.
Il donnera naissance à l’une des centrales de pompage-turbinage les plus puissantes d’Europe. Avec ses 900 MW, elle produira environ 2,5 milliards de kWh par année. Sa mise en service sera progressive dès 2019.
Les travaux de génie civil, commencés le 25 septembre 2008, vont s’achever cet automne avec le bétonnage de la dernière bâche-spirale. Les dernières installations de l’entrepreneur de génie civil seront ensuite démontées au printemps 2019 puis les remises en état des places de chantier se poursuivront probablement jusqu’en 2021.
Les défis de ce chantier de travaux souterrains en haute montagne furent nombreux et extrêmement variés. Avant de pouvoir excaver et bétonner la gigantesque caverne des machines (194m de long, 52m de haut, 32m de large), une chaîne logistique complexe a dû être mise en place avec des accès inclinés à 12 % et une multitude de sites répartis dans et sur les montagnes.
Le tunnelier ouvert a dû traverser une zone de faille sous une pression hydrostatique de 32 bars à proximité du barrage voûte d’Emosson. La réalisation des deux puits verticaux de 400 m a nécessité l’engagement de moyens peu communs dans un environnement naturellement radioactif.
La réalisation des prises d’eau dans le barrage d’Emosson a été qualifiée d’épopée par certains journalistes. Il a fallu travailler durant 8 hivers dans le fond du lac d’Emosson pour réaliser les prises d’eau sous la menace des avalanches. Les deux structures en béton d’un poids de 1600 tonnes chacune, ont été déplacées par flottaison sur 900 m et mises en place à lac plein par 110 m de profondeur.
Pour surélever le barrage du Vieux-Emosson de 20 m de manière économique, il a fallu transformer son système statique. Cela a nécessité le fraisage des 20 premiers mètres de la partie supérieure du barrage avant de bétonner sa nouvelle géométrie.
Le chantier a fait face à plusieurs aléas importants durant les 10 ans de travaux dont le plus étonnant fut l’accueil d’une arrivée du Tour de France en 2016.
Ce chantier absolument hors norme a été récompensé par le prix du meilleur projet de travaux souterrains du monde, dans la catégorie projet majeur, en 2014.